Comment devenir éditrice de non-fiction, spécialisée en psychologie

Catherine Meyer est une pure littéraire, et s'est lancée en non-fiction très tôt dans sa carrière. Après avoir démarré au dictionnaire Le Robert, elle rejoint Flammarion en non-fiction. Mais qu'entend-t-on par non-fiction ?

"Cela regroupe beaucoup de choses, des essais en sciences humaines aux livres d'actualité en passant par les biographies et autobiographies". En plus de cette diversité de genre, Catherine Meyer a autant travaillé sur des créations originales que sur des traductions.

Preuve aussi qu'un parcours dans l'édition peut ne rien avoir de linéaire, elle met en pause ses activités quatre années durant pour pratiquer une autre passion prenante : le chant pour l'opéra.

Cette parenthèse refermée, elle intègre les éditions Odile Jacob en non-fiction scientifique. Elle confirme "je me suis même spécialisée en psychologie scientifique, notamment avec la collection "les self help" avant de rejoindre les éditions Les Arènes / l'Iconoclaste" pour lesquelles elle travaille actuellement.

Catherine Meyer y crée le département psychologie avec la sortie retentissante en 2005 du Livre noir de la psychanalyse. "Ce livre a entraîné une grande polémique car c'était encore l'époque de la psychanalyse toute-puissante qui n'admettait pas d'autres formes de psychologies" ni des prises de parole en-dehors du cercle des psychanalystes.

"Les années 2000 ont été marquées par l'émergence de trois courants successifs que l'on a retrouvé dans la publication d'ouvrages de non-fiction spécialisés : la vague comportementale, la vague cognitive puis la vague émotionnelle qui inclut les courants autour des pratiques de méditation." Des livres emblématiques ont alors paru tels que Méditer jour après jour par Christophe André.

"Ce que j'aime dans tout cela, c'est faire des livres utiles".

D'où part la création de livres, quel est le processus et les décisions éditoriales prises ?

Comment démarre un projet de livre :

"Il existe trois cas de figure principaux : je collabore au quotidien avec mon réseau d'auteurs constitué avec les années, certains auteurs me contactent en direct pour un projet de livre, ou encore il s'agit de commandes de ma part directement à des auteurs ou spécialistes que j'ai en tête."

Un exemple de commande de livre qui a donné lieu à de francs succès ? Une série BD de self-help Le Club des anxieux qui se soignent ou encore Les rescapés du burn out publiés par Catherine Meyer. "Le scénario et la construction de l'ouvrage sont alors opérés par des scénaristes ou moi-même, avant de trouver un.e illustrateur.trice."

"Je bénéficie d'une liberté précieuse en faisant partie d'une maison d'édition indépendante qui ne subit pas le couperet des grands groupes et de leurs comptes d'exploitation."

D'autres acteurs peuvent influer sur les choix éditoriaux, sans avoir un avis déterminant à l'instar de l'équipe interne de diffusion ou encore des représentants auprès des librairies.

"Le fonctionnement particulier de notre maison, très horizontal et collaboratif, nous permet de confronter différents points de vue pour donner un retour le plus « objectif » possible à l’auteur : quand on est éditeur, on n’a jamais de certitude dans le feed back à l’auteur, c’est pourquoi on échange nos points de vue."

Le métier d'éditeur est un métier créatif qui inclut toujours une prise de risque

Peu de personnes externes à la profession en ont conscience mais c'est bien le cas. "Malheureusement, de nombreux éditeurs se contentent de regarder la plateforme GFK pour reproduire des titres qui ont fonctionné commercialement parlant. Cela limite les possibilités et réduit l'horizon, c'est dommage."

La prise de risque est inhérente au métier d'éditeur, et les retombées presse sont un vrai levier que tout éditeur vise pour transformer l'essai en succès.

Contrairement à la fiction où les retombées presse ont souvent une influence limitée sur les ventes, "en non-fiction, elles ont un vrai impact que ce soit au travers d'émissions bien connues comme la Grande Librairie, Belle époque, Quotidien ou encore la matinale de France Inter."

La presse écrite a beau être en diminution, elle continue d'être lue par les journalistes et les spécialistes, ce qui en fait un levier incontournable encore aujourd'hui.

La prise de risque se retrouve aussi dans l'évolution du métier et le fait de suivre les évolutions sociétales comme l'émergence des réseaux sociaux.

Les éditions les Arènes / L'Iconoclaste disposent donc en interne d'une équipe contenu pour travailler leur présence sur Instagram, les plateformes digital en général et leur chaîne Youtube.

En ce qui concerne les auteurs, le fait de disposer d'une communauté pèse de plus en plus. "Ce n'est pas encore un critère de sélection pour choisir un auteur plutôt qu'un autre mais c'est de plus en plus déterminant. C'est en train d'arriver en France c'est certain." La publication du livre Les gens sont beaux de Baptiste Beaulieu en est un bel exemple.

Quelles différences entre fiction et non-fiction dans le métier d'éditeur ?

Catherine Meyer confirme qu'il en existe :

"la non-fiction a quelque chose de très rationnel, et la parole de l'éditeur a alors d'autant plus de poids dans le processus de création. La finalité du livre est mieux définie."

Mais les frontières sont de plus en plus poreuses entre fiction et non-fiction, notamment lorsqu'essai et "écriture du réel" se confondent ou encore certaines fictions comme celles d'Emmanuel Carrère.

"Aussi, il y a moins de subjectivité en non-fiction, qui requiert également une ou plusieurs expertises bien identifiées pour mener à bien le projet de livre", au contraire des ouvrages de fiction qui relèvent plus de subjectivité et pour lesquels l'éditeur disposera de moins d'arguments objectifs pour retravailler le texte.

"En psychologie, en linguistique, dans tous les domaines de non-fiction, l'expertise compte et, alors, la crédibilité et la légitimité de l'ouvrage reposent aussi beaucoup sur le profil de l'auteur."

Bien sûr, de nombreux auteurs ont combiné les deux, fiction et non-fiction, à l'instar de Simone de Beauvoir et Jean-Paul Sartre, mais aussi de l'ethno-psychiatre Toby Nathan ou encore de Matthieu Palain.

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Avec quelques retombées presse qui risquent de vous donner envie de le lire...

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