Elle s'est formée à l'histoire de l'art et l'a enseigné des décennies durant, a pratiqué le commissariat d'expositions artistiques notamment pour défendre des oeuvres de femmes, et se retrouve aujourd'hui à la tête d'une jeune maison d'édition en plein essor. Chrystelle Desbordes a un enthousiasme communicatif lorsqu'elle évoque sa passion de l'art et des mots, son projet de maison d'édition devenu réalité et ses publications en cours.
J'ai échangé avec elle après avoir découvert l'une des dernières publications de la maison : Rendre chair, une biofiction sur Alie Neel de Florence Andoka.
Au-delà de la découverte d'une vraie plume et d'un récit fragmenté mais à la globalité envoûtante, j'ai découvert une maison d'édition défendant une ligne éditoriale originale et claire. Assembler et faire converser l'écriture et l'art, les mots et les artistes, traverser les frontières des différentes disciplines et faire voir des récits et des points de vue uniques. Auxquels nous ne sommes pas habitués.
Alors merci à Chrystelle Desbordes pour cet envoi, ces découvertes et place au bel échange que nous avons eu en janvier dernier.
Parcours atypique : d'historienne de l'art à statut pluriel d'éditrice
Chrystelle Desbordes a démarré au sein du milieu académique, bien avant de basculer dans le monde de l'édition. Mais son lien avec les livres, les mots et l'édition remonte à ses débuts : création d'une revue lorsqu'elle était aux Beaux-arts, critique d’art depuis 1997 — elle contribue notamment à la revue Mouvement — et premières expériences d'auto-édition.
Passionnée de lecture dès l'enfance, et notamment de la littérature du XIXe et de Maupassant à l'adolescence, Chrystelle Desbordes a souhaité combiner ses passions en fondant sa maison d'édition. D'autant que la reconnaissance et la diffusion des ouvrages en milieu académique restaient trop limitées.
"Je voulais quelque chose de plus stimulant et autour de la notion de partage en dehors du monde académique". Sa résidence en Californie dans les années 2010 de plusieurs mois a été un déclencheur "en rentrant, j'ai lancé Les plis du ciel".
Comment créer une maison d'édition : une question d'envie et de vision
"J'aborde les mots comme un matériau. Mon cerveau fonctionne par association inévitable entre visuel et texte". Lancement de sa maison d'édition en 2021 donc mais une question centrale se posait : est-ce possible de devenir éditeur à l'ère d'Internet ? Comment apporter de la valeur en plus du contenu qui existe déjà et sous de multiples formats ?
Mais le projet des plis du ciel est solide, avec une ligne éditoriale différenciante que l'on ne retrouve nulle part ailleurs : " l'objectif est de créer des correspondances entre des arts différents, des systèmes d’association entre arts visuels et textes littéraires".
Son premier titre sorti en 2021 rassemble un texte d’Olympe de Gouges avec un texte de Condorcet mis en résonnance avec l'oeuvre d’une artiste féminine. "Je souhaitais laisser au lecteur la possibilité d'associer textes et images sans contrainte, de proposer un voyage, de laisser libre interprétation."Un jeu de correspondances donc, des frottements, "des frictions mais aussi des synergies pour permettre de nouvelles mises en perspectives sur des oeuvres connues et méconnues."
L'objectif des plis du ciel ? Créer des ouvertures.
Aujourd'hui, deux ans après le lancement de la maison d'édition, Chrystelle Desbordes est entourée d'une équipe pluridisciplinaire et qui se constitue autour et en fonction de chaque projet. Maquettiste, design graphique, relectures, "et mon réseau personnel souvent pour constituer une sorte de comité de lecture".
Une organisation flexible et une vision au service d'une édition durable, en phase avec les évolutions du monde de l'édition.
Pensez à ces jeunes maisons d'édition au projet ambitieux, une belle alternative aux publications des mastodontes de l'édition ;)